Légalisation du cannabis :

pour une approche sociale, sanitaire et solidaire.

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L’année 2014 a été riche en nouvelles et rebondissements sur le thème du statut légal du cannabis dans le monde. En France, il semblerait qu’une des premières revendications des usagers de chanvre (le nom français pour « cannabis ») se soit réalisée : le débat est ouvert. L’éventualité d’une « légalisation » du chanvre existe désormais, et les différentes modalités sont enfin discutées.

En 2015, la coordination Chanvre & Libertés appelle de ses vœux une amplification du débat, mais surtout une réflexion autour des deux principaux enjeux du futur des politiques des drogues : la santé et l’emploi. Une telle approche novatrice et pragmatique devrait venir compléter les impératifs économiques trop souvent seuls mis en avant, image du récent rapport publié par le think-tank Terra Nova. Pour ne pas reproduire les erreurs du passé, et mettre en place une politique juste, émancipatrice et efficace en termes de santé publique, il est nécessaire de s’ancrer résolument dans un contexte national et contemporain qui est très spécifique. À ce titre, Chanvre & Libertés, en tant que mouvement réunissant des experts de la société civile (usagers de chanvre, professionnels du social, de la santé, du droit…) est à même de fournir un avis équilibré et constructif, représentatif de ce qu’une bonne frange de la société civile revendique.

S’adapter aux réalités de terrain.

L’hypothèse de libéralisation du marché du chanvre dans un cadre concurrentiel, comme celle de contrôle monopolistique de celui-ci, nous paraissent inadaptées aux réalités de terrain. Si dans tous les cas une légalisation renforcera les libertés et diminuera la criminalisation d’une bonne partie de la société, elle ne doit pas pour autant tourner le dos à ses objectifs de maîtrise de l’offre pour lutter contre la hausse de la consommation. Et pour maîtriser une offre qui est totalement dérégulée depuis 45 ans, il faut réglementer et normaliser les filières déjà existantes (et leurs clients) plutôt que de vouloir y substituer un nouveau marché légal sorti des bureaux de Bercy.

« Une telle avancée sociétale, pour faire preuve d’efficacité, doit s’intégrer dans le secteur de l’économie sociale et solidaire, afin que le chanvre légal ne devienne pas une marchandise de masse comme les autres » estime Arnaud Legrain, membre de la commission Usage(s) et société de Chanvre & Libertés.

Le trafic de masse qui s’est développé dans les quartiers sensibles fait vivre (voire simplement survivre) un nombre inestimable de personnes [cf. notre article sur l’état des lieux du trafic]. Ne pas penser à la reconversion des banlieues vers un marché légal serait une erreur politique dangereuse pour la paix et la justice sociales, lourde de conséquences.

Farid Ghehiouèche, membre de la commission Droit et législation, estime « qu’il est possible d’instaurer un marché commercial contrôlé par l’Etat selon les normes définies dans les trois conventions internationales en vigueur. Il se substituerait au marché noir existant, notamment dans les villes ou les quartiers où le deal existe déjà, en favorisant la création d’emplois réguliers au bénéfice des personnes issues du trafic. Cela pourrait prendre la forme de coopératives de production (implantées prioritairement dans les Zones de Redynamisation Rurales) et des comptoirs de distribution implantés en Zones Urbaines Sensibles. »

De même, l’auto-production est un phénomène courant, et désormais quasiment traditionnel. Ne pas imaginer de système autorisant une production raisonnable de chanvre à des fins personnelles ferait perdurer une atteinte fondamentale aux libertés individuelles. Pour Christophe Kolerski, président de l’association « CIRC Moselle », affiliée à la coordination Chanvre & Libertés, « l’autre filière qu’il faut préserver, c’est celle qui offre un cadre à l’auto-production, à travers notamment des Cannabis Social Club, des associations d’auto-support, à but non-lucratif, aptes à améliorer la prévention et à favoriser un suivi de l’usage par les pairs, en confinant ces aspects dans un cercle privé ».

Des membres de Chanvre & Libertés ont, à ce propos, rédigé une proposition d’amendement au Projet de loi relatif à la Santé, présenté par la Mme Marisol Touraine, proposant l’introduction d’un volet autorisant l’expérimentation de structures semblables à des Cannabis Social Clubs. [Accéder à la proposition d’amendement en cliquant ici]

Soyons conscients que, pour mieux lutter contre le trafic, il faut y  substituer un marché légal qui le supplée efficacement, qui en réhabilite les acteurs, protège l’ensemble des citoyens, et assure la stabilité de nos institutions.

L’ensemble des membres et des associations affiliées de la coordination Chanvre & Libertés vous souhaitent une excellente année 2015, assurément riche en débats et, espérons-le, foisonnante sur le plan législatif.

La Coordination Chanvre & Libertés,

et ses entités affiliées Cannabis Sans Frontières et CIRC Moselle.

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2015